"L'Anglais, langue française" (Books, Décembre 2010-Janvier 2011))
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"L'Anglais, langue française" (Books, Décembre 2010-Janvier 2011))
J'inaugure donc cette partie "Linguistique" toute neuve.
L'article est paru dans Books. Il a été écrit par Jon-Kris Mason qui nous fait un review d'un livre de Thora van Male : Liaisons généreuses, l'apport du français à la langue anglaise (Arléa, 2010). L'auteur s'intéresse principalement aux emprunts de vocabulaire en les replaçant dans leur contexte historique et en les classant par thèmes au sein de l'ouvrage (mots à connotations sexuelle, faux amis, mots du snobisme...)
Vous pouvez trouver le scan ici (si vous voulez lire l'article en entier) ainsi que les points principaux à retenir (en vue du cours, si on aborde ce sujet là).
• 1066 : perçue comme le dernier exemple d'invasion réussie. La colonisation normande greffe sur le vieil anglais le code génétique du français. Le résultat en est un hybride de latino-teutonique, qui devient l'"anglais moderne".
• Aux XIIème et XIIIème siècles : les langues de la cour, de l'Église, de la justice, du commerce et de l'administration sont le français et le latin. A leur contact l'anglais se transforme (caractéristiques germaniques abolies) : il devient souple et malléable (assimilation de mots de langues étrangères).
• Certains regrettent l'emploi du français (et le clivage entre noble et valet dans l'utilisation de la langue). C'est ce que déplore le bouffon saxon Wamba dans le roman Ivanhoé de Walter Scott (1819) : "ce vieil édile Ox, il continue à porter son nom saxon tant qu'il est sous la garde de serfs et d'esclaves tels que toi; mais il devient Beef, c'est-à-dire un fougueux et vaillant Français, quand on le lace sous les honorables mâchoires qui doivent le dévorer ; Monsieur Calf aussi devient Monsieur de Veau de la même façon ; il est Saxon tant qu'il requiert nos soins et nos peines et prend un nom normand dès qu'il devient un objet de régal."
• Avant le XIIIème/XIVème siècles : pas de fusion entre la langue et l'identité nationale.
• Ce n'est qu'à partir du XVIème siècle (quand la Réforme fit disparaître le latin de la vie quotidienne) que le lien entre la nation et sa langue vernaculaire est tissé.
• 1660 : francophile Charles II sur le trône permet une nouvelle ère d'emprunt du français.
• XVIIIème : politique et patriotisme commencent à l'emporter sur les impératifs linguistiques ou stylistiques (le taux d'emprunt diminue).
• Renaissance : Angleterre libérale et licencieuse imite la société et la langue française.
• XVIIIème : Angleterre plus austère et ombrageuse entend vaincre les Français. Le débat actuel autour de l'utilisation du mot email/courriel est comparable aux débats dans l'Angleterre du XVIIIème à propos du lexique de la technologie militaire.
• Trois sortes de mots d'emprunts : les remplaçants, les synonymes et les mots désignant une chose ou une idée nouvelle.
• Au XVIII, la critique porte particulièrement sur les deux premières catégories.
Le monosyllabisme anglais, condamné par Dryden à la fin du XVII, devient pour les yeux et les oreilles du XVIIIème un signe de force, d'honnêteté et de sens.
• Durant la période georgienne (1714-1837), on accuse l'éclat esthétique et euphonique du français de masquer l'imprécision, la frivolité, le manque de sens. Parallèlement le français reste le "dialecte élégant" de la bonne société georgienne.
• La Révolution française (comme le souligne Burke) modifie l'attitude anglaise à l'égard de nombreux termes d'origine française : les mots anglicisés "people", "citizen" ou "liberty" prennent une connotation révolutionnaire (ils gardent une nuance politique aujourd'hui encore).
•Au XIXème : le français est perçu comme une langue seyant aux jeunes filles pour progressivement perdre cette connotation sexuée et retrouver son association première avec la classe sociale.
• Le français est toujours synonyme de ce qui est olé-olé, mais c'est aussi la langue des anglais désireux d'élever leur élocution. C'est également le lien concret entre les îles Britanniques et le continent.
L'article est paru dans Books. Il a été écrit par Jon-Kris Mason qui nous fait un review d'un livre de Thora van Male : Liaisons généreuses, l'apport du français à la langue anglaise (Arléa, 2010). L'auteur s'intéresse principalement aux emprunts de vocabulaire en les replaçant dans leur contexte historique et en les classant par thèmes au sein de l'ouvrage (mots à connotations sexuelle, faux amis, mots du snobisme...)
Vous pouvez trouver le scan ici (si vous voulez lire l'article en entier) ainsi que les points principaux à retenir (en vue du cours, si on aborde ce sujet là).
• 1066 : perçue comme le dernier exemple d'invasion réussie. La colonisation normande greffe sur le vieil anglais le code génétique du français. Le résultat en est un hybride de latino-teutonique, qui devient l'"anglais moderne".
• Aux XIIème et XIIIème siècles : les langues de la cour, de l'Église, de la justice, du commerce et de l'administration sont le français et le latin. A leur contact l'anglais se transforme (caractéristiques germaniques abolies) : il devient souple et malléable (assimilation de mots de langues étrangères).
• Certains regrettent l'emploi du français (et le clivage entre noble et valet dans l'utilisation de la langue). C'est ce que déplore le bouffon saxon Wamba dans le roman Ivanhoé de Walter Scott (1819) : "ce vieil édile Ox, il continue à porter son nom saxon tant qu'il est sous la garde de serfs et d'esclaves tels que toi; mais il devient Beef, c'est-à-dire un fougueux et vaillant Français, quand on le lace sous les honorables mâchoires qui doivent le dévorer ; Monsieur Calf aussi devient Monsieur de Veau de la même façon ; il est Saxon tant qu'il requiert nos soins et nos peines et prend un nom normand dès qu'il devient un objet de régal."
• Avant le XIIIème/XIVème siècles : pas de fusion entre la langue et l'identité nationale.
• Ce n'est qu'à partir du XVIème siècle (quand la Réforme fit disparaître le latin de la vie quotidienne) que le lien entre la nation et sa langue vernaculaire est tissé.
• 1660 : francophile Charles II sur le trône permet une nouvelle ère d'emprunt du français.
• XVIIIème : politique et patriotisme commencent à l'emporter sur les impératifs linguistiques ou stylistiques (le taux d'emprunt diminue).
• Renaissance : Angleterre libérale et licencieuse imite la société et la langue française.
• XVIIIème : Angleterre plus austère et ombrageuse entend vaincre les Français. Le débat actuel autour de l'utilisation du mot email/courriel est comparable aux débats dans l'Angleterre du XVIIIème à propos du lexique de la technologie militaire.
• Trois sortes de mots d'emprunts : les remplaçants, les synonymes et les mots désignant une chose ou une idée nouvelle.
• Au XVIII, la critique porte particulièrement sur les deux premières catégories.
Le monosyllabisme anglais, condamné par Dryden à la fin du XVII, devient pour les yeux et les oreilles du XVIIIème un signe de force, d'honnêteté et de sens.
• Durant la période georgienne (1714-1837), on accuse l'éclat esthétique et euphonique du français de masquer l'imprécision, la frivolité, le manque de sens. Parallèlement le français reste le "dialecte élégant" de la bonne société georgienne.
• La Révolution française (comme le souligne Burke) modifie l'attitude anglaise à l'égard de nombreux termes d'origine française : les mots anglicisés "people", "citizen" ou "liberty" prennent une connotation révolutionnaire (ils gardent une nuance politique aujourd'hui encore).
•Au XIXème : le français est perçu comme une langue seyant aux jeunes filles pour progressivement perdre cette connotation sexuée et retrouver son association première avec la classe sociale.
• Le français est toujours synonyme de ce qui est olé-olé, mais c'est aussi la langue des anglais désireux d'élever leur élocution. C'est également le lien concret entre les îles Britanniques et le continent.
Marie- Messages : 642
Date d'inscription : 13/10/2010
Re: "L'Anglais, langue française" (Books, Décembre 2010-Janvier 2011))
"latino-teutonique" c'est bizarre XD
clem- Messages : 939
Date d'inscription : 13/10/2010
Age : 32
Localisation : France
Emploi/loisirs : Bourguignon
Humeur : flaubertienne
Re: "L'Anglais, langue française" (Books, Décembre 2010-Janvier 2011))
Il est vraiment cool ce magazine ^^
Edit : whaaa je l'ai fait ^^ -1337 ème post. -
Edit : whaaa je l'ai fait ^^ -1337 ème post. -
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